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Affaire « Coup de d’État » au Bénin : le Colonel Tévoèdjrè fait des révélations à la Cour

Suspendue le jeudi 23 janvier dernier, pour permettre aux accusés de désigner de nouveaux avocats après la démission collective de leurs précédents conseils, l’audience du procès de « complot contre l’autorité de l’État » a repris ce mardi 28 janvier 2025 devant la Cour de Répression des Infractions Économiques et du Terrorisme (CRIET). Malgré l’absence des conseils aux côtés des prévenus Olivier Boko, Oswald Homéky et leurs co-accusés, la Cour a ordonné la poursuite de l’audience.

Ainsi, le Chef antenne sud de la brigade criminelle, le commissaire de deuxième classe Victorien Nounagnon a été invité à la barre pour présenter les résultats de ses enquêtes. À sa suite, le Commandant de la Garde républicaine, le Colonel Martial Djimon Tévoèdjrè s’est confié à la Cour. Retrouvez ci-dessous ses déclarations 👇

« Je suis à ce poste depuis juillet 2016. En tant que commandant garde républicaine je suis en charge de la sécurité du chef de l’État, de sa famille, des membres du gouvernement et de toutes les institutions de l’état… Il faut dire que Monsieur Oswald Homeky et moi sommes des amis. On s’est connu depuis qu’il est au gouvernement. On était très proches. C’est l’un des rares membres du gouvernement que je tutoie. Il m’a fait rejoindre un Lions club dont il est le fondateur. A sa sortie du gouvernement nos relations sont restées.

Le 30 Mai 2024, il m’a fait appel pour que je passe le voir un soir… Nous habitons le même quartier sa maison est à deux minutes de la mienne à pieds…. Contrairement aux conversations que nous avions habituellement, les discussions ce jour-là tournaient autour du chef de l’État, mon patron dans le but de me révolter. Il a évoqué mes conditions de travail, qu’il trouvait dérisoire. Je me rappelle qu’il est allé dire que je suis le commandant de garde républicain le plus pauvre de la planète. Plusieurs autres rencontres ont suivi. 30 juin 2024, entre autres il m’a fait appel. On a échangé, il a continué dans la même veine à critiquer le chef d’état. Il m’a fait cadeau de 5 millions de FCFA. Le 07 juillet 2024 il m’a fait appel une nouvelle fois. Il est revenu encore sur les agissements de mon patron. C’est ce jour-là qu’il a évoqué une ouverture de compte a NSIA BANQUE. Pour lui c’était pour améliorer mes conditions de travail. Selon ses propos ce compte serait de pouvoir continuer d’avoir le même rythme de vie. Quand il m’en a parlé,il a dit qu’il fallait qu’une forte somme y soit déposée, je n’avais pas les moyens là. Il m’a dit que le grand frère s’en chargera. Habituellement c’est Olivier BOKO qu’on appelle Grand frère.

Je suis militaire et le militaire est apolitique officiellement et officieusement. Si le coup avait réussi, ce qui était prévu c’est que je sois le chef de la junte jusqu’en 2026. Et on organise les élections en 2026. Oswald Homeky allait s’attribuer le poste de conseiller spécial du chef de l’État que je devais être. Côté civil nous avions le nom de Sévérin QUENUM qui a été évoqué pour être président de la Cour Constitutionnelle. Olivier BOKO devait rester en retrait jusqu’aux élections de 2026. Je n’ai jamais discuté d’un tel projet avec Olivier BOKO.

Tout a commencé le 30 mai 2024. Le 30 juillet, c’est la première fois que Oswald Homeky m’a parlé du coup d’Etat. Par la suite, le 30 septembre était la date initiale du coup d’Etat. Mais elle a été ramenée au 27 septembre.

Ce 30 septembre n’a pas été choisie par hasard parce que HOMEKY connaissait les mouvements du chef de l’État. Le Président devait participer au sommet de la Francophonie. Oswald HOMEKY soulignait que le coup devait être fait pendant qu’il était au bureau, entre-temps il y a eu un report de date. Un soir sur invitation, je suis allé voir Oswald Homeky. Il a dit que Olivier BOKO l’a instruit de lui organiser un voyage. Lors de nos discussions, je lui ai dit que j’ai les hommes et je connais la mission mais il fallait des moyens financiers. C’est à ce moment là que les 1 milliard 500 millions ont été fixés. Les fonds serviront à intéresser ceux que je vais choisir pour le coup et ceux qui ne seront pas dans le coup, pour ma propre personne, au cas où ça passe ou ça casse.

Je lui ai dit un soir, j’ai fais exprès de lui dire que le Capitaine major Migan, ne doit pas être sur le territoire. Du 29 septembre au 07 octobre j’ai envoyé le capitaine major VIGAN au Rwanda…J’ai dit que je voulais les fonds en numéraire et une semaine avant le coup. Nous avons prévu le 22 septembre pour avoir les sous. Il a demandé après si je pouvais passer prendre une partie de l’argent j’ai dit non car je le voulais au complet. Un jour il m’a dit que les fonds étaient prêts à 95% et donc renvoyé au lendemain soir. Le lundi 23 septembre à 22h32 min il m’a dit que c’était prêt. Il me disait ensuite le jour-là qu’il avait apprêté des plaques fictives sur la voiture 4×4.

Pendant que j’essayais le véhicule il a placé lui-même les plaques..on est allé vers la malle arrière il l’a ouvert pour que je vois l’effectivité des sous. On était là quand les gens de la brigade criminelle sont venus en tenue civile et nous ont interpellés, ils ont embarqué Oswald Homeky dans un véhicule et moi dans un autre et nous sommes allés à leur base. Arrivés là-bas il y avait 6 sacs. Il a refusé d’ouvrir les sacs sans la présence de son conseil qui était Me Séverin Quenum qu’il a tenté de joindre en vain. Il a ensuite appelé son épouse pour l’informer de notre interpellation. Ensuite, nous avons été tous deux auditionnés. Je n’ai pas eu l’occasion de rencontrer Olivier Boko. Oswald Homéky ne m’a jamais donné de l’argent à titre personnel avant cette affaire.

J’avais deux possibilités. La première c’est de choisir d’accepter ce coup d’Etat et la deuxième c’est de refuser. J’ai choisi la République. Et je vous fais une confidence. J’ai 51 ans… Et ma loyauté n’est pas à marchander. Ils ont été naïfs. Ils sont tombés sur la mauvaise personne. J’ai le sentiment du devoir accompli.

Je ne me sentais pas à l’aise quand l’affaire a été rendue publique. Je me sentais en danger des deux côtés. Du côté des commanditaires et de celui que je protège. Je suis aussi en danger, j’ai pris le risque de gérer ça pendant un moment et j’ai choisi le bon moment pour informer celui que je protège. Disons que pour moi, c’était un choix délibéré de Olivier BOKO de ne pas me contacter directement. Je n’ai jamais voulu le contacter directement. Pour moi il a choisi son interlocuteur.

M. HOMEKY et M. BOKO ont été naïfs. Ils se sont trompés de personne. Moi j’ai choisi le bon moment pour informer mon patron du projet. Et je peux vous dire que l’intervention de la police au domicile de M. HOMEKY la nuit du 23 au 24 septembre 2024 ne m’ai pas étrangère. J’ai fait semblant d’adhérer au projet de coup d’Etat, c’est pour voir le bout du tunnel. Je ne trahirai jamais la République ».

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